Les pivoines corses

 

Nous nous rendons régulièrement en Corse pour nos loisirs depuis une vingtaine d'années. Si dans un premier temps nos vacances, dans cette superbe île, étaient surtout consacrées aux baignades et à de courtes randonnées, notre fils prenant de l'âge, il a été possible d'effectuer des marches de plus en plus longues, et ainsi, partir à la recherche des pivoines corses. Les lieux où poussent ces plantes sont heureusement, généralement difficiles d'accès, ce qui leur permet de ne pas trop souffrir de la cueillette ou de l'arrachage par des touristes peu conscients.

Il est nécessaire de rappeler que ces plantes sont protégées et qu'un simple bouquet vous garantit de gros ennuis. Mais, si vous décidez de braver ces interdictions et d'arracher un pied pour la replanter dans votre jardin, il faut bien savoir qu'il n'a aucune chance de supporter la transplantation car l'époque où les pivoines sont facilement repérables n'est absolument pas favorable. Pour terminer avec ce sujet, il ne faut pas oublier que le personnel des douanes est présent à l'embarquement et a été sensibilisé à la sauvegarde des espèces protégées.

Volontairement, nous ne donnerons dans la suite de cet article aucun lieu précis.

En avril 2007 nous avons eu la chance de pouvoir étudier un premier spot où poussaient de nombreuses pivoines qui ne semblaient souffrir que du piétinement de quelques vaches et du groin de quelques cochons sauvages : l'album. Nous avions, sans pouvoir le faire confirmer par des spécialistes locaux, déterminé cette fleur comme étant une Paeonia russi (ou Paeonia mascula ssp. russi) semblable à celle de notre jardin, achetée à la pépinière Ellebore au début de nos plantations. Suite à une "légère" erreur d'orientation, et une petite visite du maquis... nous n''avions pas pu rester plus d'une heure sur place.

Dans certains guides, il semblait possible de trouver d'autres pivoines plus au sud. Grâce à quelques indications et beaucoup de chance, nous avions lors de notre passage sur l'île en 2008, eu la possibilité de nous rendre sur un autre lieu où poussaient des pivoines qui  n'étaient pas en fleur mais assez semblables. Les seules différences notables, en plus du léger retard de floraison, étaient constituées d'un feuillage totalement glabre et plus foncé.

En 2009, grâce à une personne du CNRS de Montpellier avec laquelle nous avions échangé quelques informations, un contact avec une botaniste du parc régional de Corse a été établi. Notre prochaine visite s'annonçait plus simple et plus fructueuse. Il s'agissait de visiter plusieurs lieux où poussaient les trois pivoines référencées actuellement sur l'île : Paeonia mascula, Paeonia corsica, Paeonia morisii.

Paeonia mascula correspond à celles habituellement rencontrées. Elle semble installée sur l'île sur trois sites dans le centre-est (à notre connaissance). On la retrouve aussi un peu partout sur le continent et certaines îles méditerranéennes, sa rareté est surtout liée à la cueillette sauvage car elle se ressème assez facilement naturellement. De nombreuses plantules de mascula envahissent  notre jardin et ceux des voisins. Elle peut avoir été amenée du continent à l'île dans les bagages des voyageurs au cours des siècles car elle était connue des grecs et cultivée comme plante médicinale au moyen-âge. Ce n'est pas une plante endémique de la Corse.

Paeonia corsica et Paeonia morisii :

P. corsica serait une endémique typiquement corse et se retrouverait dans le sud de l'île alors que P. morisii serait une endémique corso/sarde installée plutôt dans le nord-est. Sur certains sites poussent les deux ou les trois espèces (avec mascula).

La visite des différents lieux où elles se côtoient parfois, ne m'a pas permis de vérifier les critères qui permettent de les différencier. Même en reprenant les clés de détermination de monsieur Schmitt, je ne suis pas véritablement convaincu de l'existence de deux espèces distinctes. Mes premières conclusions de 2007 (poils, période de floraison, couleur du feuillage...) n'étaient pas pertinentes pour l'ensemble des plantes rencontrées. Si vous le souhaitez, vous pouvez consulter les photographies de ces deux plantes mises côte à côte avec les clés de détermination proposées en cliquant sur le lien en bas de page.

Lors de notre rencontre, la botaniste du parc semblait, elle aussi dans le doute. Suite à ces observations, j'aurais tendance à ne reconnaitre comme valable que Paeonia corsica (comme d'autres auteurs).  Certains y placent aussi Paeonia cambessedesii, j'y serais beaucoup plus réticent car j'arrive, jusqu'à présent, à toujours faire la différence entre ces deux plantes.

Certains botanistes, surtout à l'est de l'Europe, ont tendance à multiplier le nombre d'espèces alors qu'il s'agit seulement, à mon humble avis de quelques variations.

Le CNRS de Montpellier devrait prochainement avoir une étude ADN à ce sujet.

Nous tenons à saluer le personnel du parc et les gardes (forestiers...) que nous avons rencontrés lors d'une sympathique journée de formation à la protection de ces plantes et bien évidemment remercier  madame Laetitia Hugot, pour sa gentillesse et sa disponibilité lors de notre séjour, ainsi que monsieur Max Debussche.

 

Accès aux photographies P. morisii, P. corsica, P. mascula

 

Retour accueil